Eloïse Kohn  -  Sensitive Human  

It is a place of creation, a sensitive capsule. Sensitive nerve, sensitive body, sensitive soul. It’s about sensitive spaces. Hypersensitive, hyper-aware. An awakening. A gentleness and a roundness. It is grounded, it is powerful, and it is sensitive. It’s about different sensitive spaces because we are sensitive beings. I am a sensitive being.
Multidisciplinary Artist  / Creator of Sensitive Areas          






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Écrits de licence DNA 2021 et écrits de mémoire DNSEP 2022 - Recherches théoriques et analyses. 





Introduction






Le corps est pour moi un matériau ou un outil sensible capable de ressentir, retranscrire et faire revivre des sensations, des émotions. 
Le corps est support, réactif à son environnement et aux différentes perceptions des choses qui l’entourent. Si l’on va au bout de cette logique, 
le corps est donc capable d’être affecté dans la durée, de prendre l’empreinte d’un souvenir et de la restituer, de la rendre présente plus tard, 
donc, de faire que le corps devienne le support vivant d’une mémoire individuelle ou collective.

Comment rendre perceptible cette relation entre corps et mémoire ? Quelles images peuvent émerger
de cette rencontre ?

C’est à ces interrogations que nous tenterons de répondre en convoquant différents artistes, plasticiens et chorégraphes qui sont parvenus 
à mettre en images la relation à la fois profonde et mystérieuse qu’entretient la mémoire, lieu immatériel du stockage de nos souvenirs, et notre corps.


Bill Viola et l’immersion : revenir à notre mémoire et corps primitif.


Différentes installations de l’artiste Bill Viola mettent en scène une mémoire immergée dans le corps. Les installations de l’artiste témoignent 
d’une noyade d’enfance, qui reste un souvenir récurrent. Il traite le corps et la mémoire comme éléments principaux dans ses œuvres. 
Dans « Stations1 »qui montre des corps nus nageant dans un liquide noir ou « The reflecting pool2 » le phénomène d’immersion interpelle la mémoire primitive du spectateur. Dans les installations, les vidéos de l’artiste, le son joue un rôle essentiel pour transmettre une idée et une image grâce aux sens, au corps du regardeur. 


Pour Manon Blanchette: 

« certaines œuvres de Viola mettent en place un dispositif rigoureux et déstabilisant, qui parvient à faire vivre
aux spectateurs des moments de « choc » et des états altérés de perception dont la trace dans la mémoire s’imprègne jusqu’à rejoindre la quête profonde de chaque individu3 ».



Les œuvres de Bill Viola mettent en valeur le fait que le son, comme la musique, participent d’une mémoire corporelle et sensorielle 
à travers les vibrations et pulsations qu’ils produisent.
Celles-ci nous renvoient chez Viola à nos premiers moments de vie : le bain utérin. La pulsation, les unités sonores du souffle pulmonaire 
et la mélodie des voix sont les premières choses que le fœtus perçoit avec le mouvement.
À travers cette image, on comprend comment la sensation d’immersion, à travers le son et les vibrations sonores, peut jouer un rôle essentiel 
de stimulation du corps mémoire.

Dans « Five Angels of Millennium4 », expérience immersive par dispositif de projection, Bill Viola imagine une projection imaginaire de nos propres corps. Le corps est ici « acteur » et requiert une intention. La stimulation des sens met en action ce processus de corps mémoire. Le rapport à l’eau vient interférer avec l’histoire même de Bill Viola et de son récit d’une noyade manquée enfant. Le corps est support sensible. 
Il reçoit les informations stimulant sa mémoire. C’est exactement le processus que Bill Viola met en avant par l’utilisation d’images diverses.

« The theater of memory5 » est une autre installation qui retrace cet effet de mémoire. L’arbre (élément principal) représente la vie et les connexions liées au cerveau. L’installation est basée sur la retranscription des sensations évoquant la mémoire.



La danse image du corps mémoire.

Certaines pratiques en danse contribuent à interroger le rapport qu’entretient le corps à la mémoire. Pour la psychanalyste France Schott-Billmann, 
qui utilise la danse comme thérapie

« […] la musique et le mouvement de la danse, soutient un processus de remémoration, une anamnèse collective.
Il réveille un corps-mémoire en faisant revisiter au danseur les strates oubliées de son histoire6 »


« La danse serait l’appel archaïque, l’impulsion - qui peut saisir tout ce qui est, par ses racines dans l’être à faire danser.7 »


La danse serait donc un moyen de « réveiller » cette mémoire enfouie. On pourrait évoquer le geste de se recroqueviller (position fœtal) qui renvoie
à un souvenir primal du corps dans le ventre de la mère. On retrouve ce geste dans certaines positions en danse où la tête se connecte au nombril dans une courbe du dos. La respiration vient aussi se lier au rythme de la pulsation du cœur. Nous pouvons évoquer l’action de tenir en équilibre
en pointe (ou demi-pointe) ce qui renvoie aux réflexes d’enfant, au développement de sa posture et de son équilibre. Tous ses gestes serviraient 
à exprimer ce qui se tient au plus profond de nous,  et à cette transmission de mémoire.

Pratiquée collectivement, la danse a aussi été un moyen de transmettre la mémoire d’un groupe, d’enregistrer des gestes de révolte contre 
des logiques d’oppression, notamment dans le contexte socio-politique de l’esclavagisme.
Le Séga est une danse originaire des esclaves africains se dansant en faisant glisser les pieds sur le sol sans jamais les lever, car le sable empêchait
de faire des pas “sophistiqués”. Le Séga a joué un rôle dans le besoin d’appartenance identitaire et dans le besoin de considération d’une communauté négligée et écartée.
Une manière collective d’exprimer un sentiment commun suite à des violences subies par le groupe. Plus connue encore, la Capoeira est un art martial qui se cachait des colonisateurs derrière des allures de danse. La danse est alors l’espace et le lieu qui permet d’enregistrer et de transmettre des mouvements de combat. Elle utilise aussi beaucoup les pieds, car les mains des esclaves étaient souvent enchaînées. 

La danse a permis de porter des mémoires à but collectif suite à des souffrances et des oppressions. 

Au Japon, la danse butō à aussi eu un but collectif. Le butô est une danse apparue post-Hiroshima et Nagasaki et suite à une véritable crise identitaire de la civilisation japonaise.


« En faisant de l’acte créateur un acte indissociable de la mémoire, le butô est un art qui n’apparaît pas comme le résultat de la seule subjectivité. Cela le rend profondément étranger à une vision occidentale de l’art comme expression d’une individualité […]8 »


La caractéristique du butō est cette représentation de la peur, de la mort. Les corps sont souvent perçus « cadavériques ».C’est une danse très ancrée au sol qui puise ses mouvements dans les racines du sol en se tordant de douleur. Elle dénonce et montre l’horreur de la guerre et de la souffrance
et vise à réveiller les forces cachées, les esprits des profondeurs de l’âme humaine.

« Me /Moire9 »de Yumiko Yoshioka est une performance dansée de butō. Dans sa performance, les danseuses créent des paysages de souvenirs
de leurs mémoires par leur corps nus. Les corps viennent se superposer les uns contre les autres par l’entrelacement des bras et des jambes. 
Ils vont danser ensemble puis seuls, comme témoins de vérité de leurs souvenirs. L’association des corps des 3 danseuses amène à la création 
de formes abstraites qui peut se référer à une représentation du souvenir. 

Dans le butō le décor scénique reste plus ou moins sobre, l’accent est mis sur les corps où la lumière joue sur la subtilité des formes.
On constate que la question du corps mémoire dans la danse butō est formulée par l’expression des corps eux-mêmes. La performance
« Les Mamelles du Japon10 » de Hijikata Tastumi (créateur du Butō) performé par sa femme Ashikawa Yôko montre la danseuse qui tourne sur elle-même et change à chaque tour d’expression du visage. Elle crée un personnage à multiples facettes dévoilant différents masques d’expressions.

Outre le butō, Akram Khan, danseur et chorégraphe contemporain s’inspire de la folie meurtrière des hommes dans un solo « Xenos11 » (2019) de danse contemporaine dénonçant ici aussi par l’expression du corps une mémoire d’un moment de chaos. Dans cette représentation, le décor lui est construit autour de lui, on y aperçoit des cordes qui sont avec le corps les éléments principaux de la scène. La lumière joue cette fois-ci sur l’ambiance retranscrite afin de nous plonger dans une colorimétrie immersive.


Le corps d’une mémoire personnelle à une reconnaissance collective.

Au-delà de la danse, le corps est matière sensible propre à chacun. Kader Attia, artiste, interroge la notion de membre fantôme au travers de son film 
« Réfléchir la Mémoire12 », (2016). Il parle de la mémoire, de la réparation et des questions collectives et communes autour du traumatisme. 
Le corps est objet de réflexion de mémoire, le corps est blessé. Il utilise une mémoire qui va projeter le membre existant à la place du membre perdu. On voit des personnes figées et seules. Un miroir est présent, il reflète une partie de leur corps où le membre lui n’y est plus. Il suggère le manque 
et amène à se questionner sur cette mémoire corporelle. 
Le corps est donc capable de s’adapter car même absent il est sensible, est il est surtout présent.

Je pense aussi à Sophie Ristelhueber avec « Every One13 » (1994) qui montre par des tirages argentiques la représentation de corps marqués
de cicatrices, scandées de sutures. Ces tirages sont issues des suites d’une réflexion du conflit serbo-croate 2 ans après un voyage en Yougoslavie.
À travers ces photographies, les corps portent la mémoire de guerre. Des blessures aussi visibles, uniques à chacun qui constituent un nouveau corps avec une nouvelle histoire. Nos corps changent, évoluent, ils sont les témoins de nos vies.



Vers une pratique de la danse autour de la mémoire.

Dans la production plastique que je réalise en lien avec cette problématique, je recherche à montrer le corps mémoire sous différentes perceptions
à travers différentes exploitations comme l’installation, la danse, la performance, mais aussi le son et l’édition. Je traite différents médiums pour pouvoir
témoigner au mieux de l’avancée de ma réflexion.








Bibliographie

Ouvrages

Latour Bruno, Mellor David Allan, Schlesser Thomas, « Sophie Ristelhueber Opérations », Catalogue d’exposition, Éditions
 Les Presses du réel, 2009
Neutres
Jérôme et Duguet Anne-Marie, « Bill Viola », Catalogue d’exposition Grand Palais, Galeries nationales, Éditions 
RMN-GP, 2014
Schott-Billmann
France, « Le besoin de danser », Éditions Odile Jacob, 2020
Sibony Daniel, « Le corps et sa danse », Éditions du Seuil, 1995


Expositions  /  Performances

Attia Kader, « Réfléchir la Mémoire », 48’, 2016, vidéo HD, couleur, son, Galleria Continua, Galerie krinzinger, Lehmann Maupin, Galerie Nagel Draxler, 
Paris 2018
Khan Akram, « Xenos », 70’, 2019, Théâtre de la Vilette, Paris
Ristelhuber Sophie, « Every One », Jeu de Paume, Paris, 2009, 14 photographies noir et blancs, tirages argentiques contrecollés
sur plaque de fibre de bois, 270 × 180cm ou 180 × 270cm, exemplaire uniques, 1994
Tatsumi Hijikata par Yôko Ashiwaka, « Les Mamelles du Japon »,
Maison des cultures du monde, 1983
Yoshioka
Yumiko, « Me / Moire », 60’, 2016
Viola Bill, « Five Angels for the Millennium », Centre Pompidou, 
5 vidéoprojecteurs, 10 haut-parleurs, 5 bandes vidéo, 4/3, 
couleur, son stéréo, 7’45 à 13’10, 2001
Viola Bill, « Stations », Moma, New York, médias et performance, 1994 
Viola Bill, « The Reflecting Pool », Guggenheim, Bilbao, vidéo
couleur et son, 7’ 1977-9 
Viola Bill, « The Theater of Memory », Museum of Contemporary Art, 
Los Angeles, vidéo son et installation, 1985





Articles

Blanchette Manon, « Bill Viola ou La mise en scène de la déroute », l’Annuaire théâtral, (26), 1999, https://doi.org/10.7202/041393ar
Bouillet Mariette, « Butõ le corps à l’écoute », les Éditions Intervention, 2003, 
https://www.erudit.org/fr/revues/inter/2003-n86-inter1115669/45899ac.pdf
Kober Marc, « Récits du corps au Japon », Itinéraires, 2011-3, https://journals.openedition.org/itineraires/1487
Viola Bill, London Barbara, Hoberman James, Kuspit James, « Bill Viola installations and videotapes », The Museum of modern Art, 1987,
https://www.moma.org/documents/moma_catalogue_2162_300296070.pdf


Remerciements

Un grand merci à mes tuteurs plastiques et théroriques Laurent Baude et Victor Guégan mais aussi à Olivier Soulerin pour le regard apporté 
à mon travail.
Remerciements également au CCNO d’Orléans direction Maud le Pladec, Marion Dégardin.
À Marlène Bertoux et Clémence Brunet.

Édition achevé et imprimée à l’ÉSAD Orléans en avril 2021

https://esadorleans.fr/






Memoire / Moire
Artéfact du temps


Début d’écrits d’études d’un corps.

En quoi les pratiques chorégraphiques et l'état du corps peuvent-ils activer ou revitaliser la mémoire corporelle ?


Je me souviens, me rappelle, revis et vis.
26/09/21
Le ventre se serre. La cage thoracique se réduit, c'est comme si elle cherchait à se réduire à l'échelle d'une simple et petite bille. Et au fur et à mesure qu'elle se réduit, elle gonfle sur elle-même, sans pouvoir faire d'amples mouvements. Réduite à un espace infime. Elle ne peut respirer, prendre vie. Elle arrive à se déployer quand elle inspire fort. L'air circule en excès. Comment pourrais-je traduire ce sentiment d'émotion ? De la colère ? De la rage ? Est-elle liée à la tristesse ? Comment deux sentiments d'émotion peuvent se joindre et créer une multitude de micro-actions physiques agissant à l'intérieur d'un corps ?
J'ai pu noter un déplacement de de mouvements de va-et-vient, semblables à la beauté des vagues de l'océan. Une onde, une couleur, une sensation, de la chaleur…
La chaleur du cœur qui se déplace, elle crée un trajet du centre du cœur jusqu'au sommet du crâne, jusqu'au bout de la pulpe des doigts, des orteils. J'y suis, je suis dans ce moi, mon corps central, mon enveloppe.

27/09/21
Il fait froid. Je peux le sentir. Ça m'englobe, une vague de froid et pénètre l'entièreté de mes cellules. Pas de pensée particulière à ce moment-là, sont-elles détachées de l'idée que les émotions agissent sur nous ? Ce n'est pas une émotion, mais une sensation. Elle fait partie de l'action.

28/09/2021
Position allongée sur le ventre, les jambes un peu ouvertes. Non, la jambe droite ouverte sur l'extérieur. Je sens mon pied droit en contact avec le lit, comme enveloppé à l'intérieur d'une multitude de foulards en soie. Au chaud.

Tout à coup

il prend une forme plus grande, une masse plus imposante, il grandit mais reste immobile. De même pour ma cuisse gauche.
Je vois
où mon corps est en appui.
Je me sens
en sécurité.

30/09/2021
Je me souviens. Non pas une image, une sensation. Ça sentait le matin. Un passage entre le sommeil et le réveil, m'a-t-elle réveillée ? Activer mon activité cérébrale. Une expression dit "avoir le bras endormi", qu'est-ce que cela peut vouloir dire ?
 Le bras droit subit des picotements allant du bout des doigts, passant par l'épaule pour englober le scapulaire. Comment te décrire dans le détail ? Je me souviens, je ne le vis pas mais j'ai l'impression de le revivre. C'est comme une retranscription de gestes internes incarnés par l'idée de souvenir. Je perds le signal. Ma chair,les muscles mes os, ligaments et microfibres corporelles sont en action par le simple geste de pensée antérieure. Une mémoire ? Ma mémoire, leurs mémoires. Je ne cesse de réfléchir, 
qu'est-ce que je suis ? Qui suis-je ?

10/10/2021
Exercice pied pointe ou talon. Squeeze. La hanche bouge, après le pied vient frotter au sol

pour réveiller les morts.

Ensuite, l'autre pied. Chaleur dans le pied, il devient grand, scinde son espace.
Des papillons ont traversé mon corps, mon œil tangue.


13/10/2021
On s'est allongé face au soleil, posé sur la chaleur du bois. Une discussion autour de souvenirs partagés, d'une marche. Juliette et Laure à ma gauche. Juliette parle, elle nous dit que le paysage lui rappelle d'autres de Bretagne, et à ce moment-là,

le vent se lève.

Je me sens prise par cette masse d'air qui me propulse vers l'avant. Je flotte à l'intérieur de moi, c'est tellement fort que je me déplace. Ça me rappelle mes journées à l'océan. Face à l'horizon dans l'eau, j'essaie d'avancer, les vagues me contraignent mais me font avancer pour m'enfoncer dans les profondeurs de l'eau, loin du rivage. Je ne vois plus qu'une perte d'horizon, du bleu, du jaune et le rose de mes paupières.
12:01 - L'odeur de l'arnica.
16:39 - Le vent se lève, un bel orchestre, les brins de blé vibrent, ils dansent. Je ferme les yeux, quel souvenir va-t-il me revenir ?
Je suis encore dans l'eau,

L'air devient palpable, il

devient matière

dans son propre

espace.

Mon oreille discute avec le vent, il devient matériel, un coquillage qui lui murmure, lui chantant des airs déjà vécus.


12/10/2021
Retour en arrière, pause grotte. Dans la grotte. Il ne fait pas froid. Plongée dans le noir, ce n'est pas le noir de tes yeux mais bel et bien le vrai noir, celui dans lequel on ne choisit pas de plonger, on y est bousculé, renversé.
Retour dans le bain utérin. Chaleur.

P a u s e
Je ferme les yeux, je les ouvre, répétant l'opération de nombreuses fois. Pas de différence, aucune nuance.
Je ne distingue que le bruit des gouttes d'eau.

Le silence est noir.

13/10/2021
Ramper dans les boyaux
ramper
ramper
ramper
Ramper en montée sur le côté, bras gauche en haut, bras droit mi-hauteur, les deux sont pliés, jambe droite hauteur pliée, jambe gauche mi-hauteur pliée.
Chaleur du corps, fumée bouche dans grotte.

14/10/2021

J'ai touché, j'ai touché de la pulpe de mes doigts. Glisser, en les faisant glisser dans les brins de blé.

J'ai froid


J'ai froid



j'ai froid.


Je souffle dans mes mains, je les dispose en arc de cercle l'une contre l'autre et j'inspire. L'air est froid, brûle mes poumons et j'expire. L'air est chaud. C'est un souffle qui se dépose comme une brise réconfortante et se dépose au creux de mes mains.
J'écris sur mon téléphone je fais des fautes, il fait froid. Je ne sens plus mes doigts.

Mes pieds, mouvement de marche avec appuis frivoles, droite, gauche, diagonale avant droite, diagonale avant gauche. Marche arrière.

j'ai si



FROID



le froid.


Je n'arrive plus à me sentir, le froid me traverse, me contrôle. Mais mon corps est là, je suis 100% lui. J'ai mal.
Un chien aboie. Je l'entends de l'oreille gauche. La perception de l'espace est différente due au changement de lumière. Les couleurs ont changé, se sont transformées, la luminosité a augmenté.
Je me repère plus vite. NON. Plus aussi vite.

Perturbation des perceptions

car

changements

Marcher au milieu de la route

Marcher, au milieu, de la route
Le béton n'a pas la même forme. J'ai l'impression d'être un fantôme.
Errer seul, sans but précis
Seul.

20/10/2021
Je suis fatiguée. Mon front glisse, attiré par la force de gravité, ne demandant qu'à rejoindre le sol. Ça prend du poids, c'est de plus en plus lourd.
Mes paupières, si fines, cherchent à se montrer, se déployer et recouvrir mes yeux. Je me rends compte de l'espace qu'elles englobent, je ne m'en étais jamais rendu compte avant.

Les yeux me tirent, je suis

fatiguée.

02/11/2021

je pousse l'air avec la pulpe de mes doigts.





08/11/2021
Je me sens vide. Mes organes n'ont pas leur masse habituelle, ou alors je n'arrive simplement plus à les sentir. En temps normal, ils sont omniprésents, envahissant tout l'espace interne jusqu'aux muqueuses parois. D'habitude ils respirent par des narines que je leur imagine.
Je vois, ressens et entends le vide. Je suis comme une petite fourmi perdue dans l'univers intergalactique. Au centre de ce grand espace rempli de matière. On dirait de la gelée.
Il fait noir.

La matière tourne autour de moi, elle est organique. Je suis de nouveau un fœtus.
Reste perceptible seulement des bruits de mouvements. Des vibrations. C'est mon cœur qui bat.
Les vibrations dessinent des formes, lancez un caillou dans l'eau et observez.
Des traces, des ondes, des formes ; tout se dessine et prend forme tout à coup, puis tout s'enfonce, il n'y a plus aucun échappatoire. La matière est complète.


Rappel de la semaine du 03 novembre. Nos organes. Notre corps est composé de différents sacs, de petits sacs en plastique. À l'intérieur de ces sacs, ils sont remplis d'une masse, une masse qui leur est propre. Mon estomac est dans un sac, ma rate, mes reins, mon foie… Tout ce qui me compose. Ils se touchent, se frôlent, bougent ensemble comme une danse interne. Ils flottent.
Je porte mon attention sur mes reins ; on m'a dit que l'hiver était la saison des reins. Dans le taoïsme, l'élément qui lui est associé est l'eau. C'est un temps de recentrage de soi, de son énergie primitive. Un temps d'hibernation.
Les reins sont aussi associés aux mémoires ancestrales. Situés entre le cœur et le bassin, ils sont au centre du corps.

Pourquoi et pour quoi ?

Je peux dire qu'aujourd'hui je danse pour savoir qui je suis. Hier, je dansais avec eux, tous autour de moi, et demain je danserai pour ne pas les oublier.
Ma première danse. Je n'étais pas seule. Plongée dans le noir, mon corps flottait en suivant un mouvement minime. Mes bras, jambes et chaque partie de moi étaient recroquevillés. Mon corps résonne dans une rondeur palpable, des vibrations venant de l'extérieur. Je ne danse pas seule. Guidée dans mon mouvement, guidée par le mouvement. Le mouvement de ma mère flottant dans cet espace, le seul que je connaisse, une gélatine qu'aucun rayon de lumière ne puisse traverser. Si épaisse que je peux sentir son poids.
Les battements de mon cœur sont en chœur avec son cœur.


Ma première danse est celle que j'ai faite dans son ventre.
Aujourd'hui, je cherche à me souvenir en explorant chaque partie de la cavité interne de mon propre corps, essayant de sentir la texture et la masse de chacun de mes organes, muscles, tendons et os par un dialogue, une conversation, une danse. 
Et demain je danserai avec vous, vous mes fantômes qui déambulent autour de moi, qui me parlent de mes doutes, de mes peurs, de mes angoisses, de mes ancêtres, mais surtout de vous, mes mémoires.
Je vous laisse mon espace, dansez pour moi, dansons ensemble hier, aujourd'hui et demain. Pourquoi ? Ces fantômes me hantent j'ai beau me le tourner sans cesse en boucle

Je cherche à me souvenir.


souvenir

mes souvenirs me hantent.



Hanter

Hanter…
tout les jours.
jour de pluie et beaux jours.



Fantômes fantômes fantômes fantômes fantômes fantômes fantômes fantômes fantômes.

fantômes


Plongée dans le noir mon corps flottait.

J'ai
perdu le fil.











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